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Troubles de l’apprentissage et permis de conduire ? : oui, c’est possible !


L’apprentissage de la conduite et le passage du permis symbolisent la frontière entre dépendance et autonomie. Pour les personnes souffrant de difficultés d’apprentissage, ce passage s’accompagne d’une série d’épreuves invisibles pour beaucoup, et encore trop méconnues.
Ne baissez pas les bras ! Car si le défi est bien réel et parfois décourageant, il n’en demeure pas moins que des solutions existent pour décrocher le fameux sésame qu’est le permis de conduire et, avec lui, l’autonomie.



Premiers pas vers le permis B : éclairage sur des profils singuliers

Les « troubles Dys », c’est quoi ?

Les troubles Dys sont des troubles spécifiques du langage et des apprentissages. Ils touchent 6 à 8 % de la population.
Mais de quoi parle-t-on exactement ? Ces troubles regroupent: les troubles de la lecture (dyslexie), de l’expression écrite (dysorthographie) et des activités numériques (dyscalculie), troubles eux-mêmes associés aux troubles du langage oral (dysphasie), de l’écriture (dysgraphie), de la coordination (dyspraxie) et aux troubles du déficit attentionnel avec ou sans hyperactivité (TDAH). À noter qu’une personne peut être atteinte de plusieurs troubles à la fois.

Souvent repérées durant la scolarité, ces pathologies peuvent néanmoins être diagnostiquées plus tardivement, hors cadre scolaire, et évidemment lors de la préparation au permis B, qui en est parfois un révélateur.

De quelles difficultés parle-t-on ?

Lors de l’apprentissage du Code de la route, les principales difficultés rencontrées seront le langage / la lecture, le vocabulaire lié à la conduite, la gestion de l’attention et la gestion du temps.

Concernant la conduite, ça se complique : conduire ne se limite pas à manier un volant, cela requiert une coordination constante entre vision, audition, motricité, attention, mémoire et prise de décision. Et le fait est que chaque trouble Dys peut venir perturber une ou plusieurs de ces fonctions :

- La dyspraxie affecte la planification et l’exécution des gestes moteurs.
- La dyslexie peut ralentir la lecture et la compréhension rapide des panneaux de signalisation.
- La dyscalculie affecte notamment les capacités à estimer les distances et la vitesse.
- La dysphasie rend complexe la compréhension d’instructions orales.
- Le TDAH entraîne des difficultés d’attention soutenue, de concentration et de gestion de la vigilance.

Dans ce contexte, la voiture devient le théâtre d’efforts constants pour compenser, comprendre, intégrer, mémoriser, et où chaque geste demande une attention accrue. Cette surcharge cognitive peut générer fatigue et anxiété, d’autant plus que l’apprentissage de la conduite, l’examen du permis et enfin la conduite en autonomie restent universellement complexes et anxiogènes.

Un exemple concret : le dépassement d’un véhicule sur une route à double sens… Le conducteur doit coordonner ses gestes avec précision : rétrograder, ajuster son allure, maintenir une trajectoire stable. Pour une personne Dys, ces actions, loin d’être automatisées, exigent une attention constante. Il lui faut aussi estimer les distances, lire les panneaux, évaluer la configuration de la route, et s’assurer de l’absence d’intersections proches. En parallèle, il doit anticiper les véhicules en sens inverse, observer les réactions du véhicule à dépasser, et décider rapidement de poursuivre ou non sa manœuvre dans un environnement toujours en mouvement. Cette situation engendre une forte charge mentale, souvent amplifiée chez les profils Dys.

Un défi à relever, un objectif accessible

Ce que disent les textes :

Un arrêté de 2014 définissant les conditions d’organisation de l’ETG (Examen Théorique Général, ou le fameux Code de la route), notamment celles concernant les candidats dysphasiques et/ou dyslexiques et/ou dyspraxiques, permet à ces derniers de passer l’épreuve du Code lors de séances spécifiques. Pour en faire la demande, le candidat doit fournir sa pièce d'identité accompagnée de l'un des trois documents suivants :
 
  • Une reconnaissance de qualité de travailleur handicapé (RQTH) ou une reconnaissance de handicap obtenue auprès de la maison départementale des personnes handicapées (MDPH) avec diagnostic d’un trouble Dys ;
  • Une reconnaissance d’aménagements aux épreuves de l’Éducation nationale au titre du trouble Dys ;
  • Un certificat médical de moins de six mois du médecin traitant, attestant d’un trouble Dys.
     
Le document choisi est en général présenté par l’école de conduite du candidat à la Direction Départementale des Territoires (DDT) du département concerné.

À noter que les candidats sont libres de déclarer, ou non, les troubles Dys dont ils souffrent. Le recours à une session aménagée est donc une démarche volontaire. De la même façon, une visite médicale auprès d’un médecin agréé par la Préfecture n’est pas obligatoire pour ce genre de troubles. Elle pourra néanmoins être demandé par l’inspecteur en cas d’échecs successifs à l’épreuve pratique du permis de conduire.

Quid des aménagements ?

Pour l’épreuve théorique, le candidat bénéficiant d’un aménagement se voit accorder un délai plus important pour visionner les photos et les vidéos et pour répondre aux questions, et d’une relecture de la question à haute voix par l’un des inspecteurs agréés présents. Le candidat passe cet examen lors des sessions prévues pour les personnes sourdes ou malentendantes, dans un délai maximal de trois mois suivant l’enregistrement de la demande d’inscription à l’examen du permis de conduire auprès des services préfectoraux.

L’épreuve pratique peut, quant à elle, faire l’objet d’aménagements personnalisés selon la nature et l’intensité du trouble. Contrairement aux personnes en situation de handicap, les candidats Dys passent exactement la même épreuve du permis devant l’inspecteur que le reste de la population, mais avec simplement quelques aménagements.

Repérer les difficultés en amont

Avant de débuter l’apprentissage, il est utile d’identifier les éventuelles difficultés, tant pour le Code que pour la conduite. Une séance sur un simulateur de conduite dans une auto-école équipée, avec un formateur quelque peu expérimenté, peut alors offrir un soutien très précieux en début de parcours.

Si des troubles sont suspectés durant l’apprentissage, une visite médicale peut permettre de poser un diagnostic. Changer d’auto-école (pour une autre, plus adaptée) peut alors s’avérer nécessaire. Et tant que vous n’avez pas été présenté à une épreuve, c’est globalement possible, mais après un premier échec, l’opération est beaucoup plus compliquée. Le choix de la bonne auto-école devient d’autant plus crucial lorsque l’on souffre de troubles Dys. N’hésitez pas à les visiter et à échanger avec les moniteurs afin de faire le bon choix. Attention aux tarifs trop compétitifs, préférez les auto-écoles avec une véritable approche pédagogique.

Dans tous les cas, un avis médical peut s’avérer utile en cas de doutes sur des difficultés plus ou moins prégnantes, afin de déterminer les capacités et les éventuelles limitations liées aux troubles posant le plus de problèmes.

Choisir la bonne auto-école et la bonne formule d’apprentissage : la clé d’un apprentissage serein

Les formateurs ne sont pas tenus de se former aux troubles Dys. Il est pourtant essentiel qu’ils en aient une certaine connaissance afin d’adapter leur méthode d’enseignement. Dans la majorité des auto-écoles, l’enseignement est standardisé : consignes orales rapides, gestes à automatiser rapidement, apprentissage théorique dense et visuel. Peu de place à la reformulation, la répétition ou les pauses cognitives. Or, les personnes Dys ont besoin de beaucoup de temps, de clarté, de routines sécurisantes, et de bienveillance…

Bien choisir son auto-école est donc primordial. Le combo parfait ? Des moniteurs formés (ou au moins sensibilisés à la pédagogie Dys, ou au moins motivés), un simulateur de conduite et la possibilité d’opter pour le permis de conduire en boîte automatique dans un premier temps, quitte à passer ensuite la passerelle (boîte auto / boîte mécanique) après une première expérience de la conduite.
Fréquemment proposée face aux difficultés d’apprentissage de la conduite et du permis (telles que le stress), cette formule permet de se libérer du levier de vitesse et du maniement de l’embrayage, ôtant ainsi une sacrée épine « du pied gauche » (car oui, le pied gauche devient inutile avec une boîte automatique). Un allègement non négligeable, donc, pour les personnes Dys, chez qui la coordination embrayage/levier de vitesse constitue un véritable obstacle. Toutes les écoles de conduite n’offrant pas des enseignements spécifiques, il convient fortement de consulter la liste des auto-écoles adaptées aux troubles dys.

À noter qu’en 2020, un guide particulièrement clair et complet a été édité à l’initiative du CEREMH (Centre de Ressources et d’innovation Mobilité Handicap) à l’attention des formateurs. Une plaquette, réalisée par DFD (Dyspraxie France Dys), existe également. Deux documents que les apprenants peuvent eux aussi explorer afin de découvrir les différentes modalités d’enseignement pouvant leur être proposées.
 

Aujourd’hui, ils conduisent !

Le leitmotiv de personnes « Dys » ayant obtenu leur permis est simple : patience, motivation et confiance en soi. Les témoignages le confirment : l’apprentissage est plus long, plus cher, certains se découragent, voire abandonnent. Mais l’échec n’est pas une fatalité. Patience, motivation et confiance en soi sont les crédos de ceux qui, aujourd’hui, roulent en totale autonomie et de façon sécure. Ce qui ressort également, c’est cette capacité à « composer » avec ces troubles, notamment avec la dyspraxie. Tous connaissent leurs principales faiblesses, et ceux qui conduisent expliquent qu’ils ont réussi à pallier leurs difficultés en adaptant leur conduite et en choisissant le véhicule qui leur convenait.


Les règles d’or pour réussir …

Contactez le BER de votre département qui pourra vous aiguiller, ainsi que les diverses associations.
 
  • Informez-vous sur les auto-écoles adaptées ou a minima sensibilisées aux troubles Dys. Posez des questions précises sur les aménagements qu’elles peuvent vous proposer.
  • Misez sur les outils numériques (difficile de trouver des ouvrages adaptés) tels que : Code en poche (formation en ligne spécialement adaptés aux personnes Dys) et le CEREMH   (préparation au Code adaptée aux difficultés d’apprentissage). (Pour la Belgique, il existe également un guide sur les troubles Dys et le permis
  • Posez-vous la question de la formule du permis boîte automatique avec passerelle vers boîte mécanique.
  • Et surtout : donnez-vous du temps, restez motivé(e) et confiant(e) !

 

Samedi 19 Avril 2025
Céline Picard



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