Apprentissage et examens du permis : un système à revoir !


Retrouvez quelques pistes de réflexion sur les tenants et les aboutissants du permis B avec le constat dressé par Nina Belile, ex candidate au permis B et auteure du témoignage humoristique Permis de galérer. Découvrez les différentes composantes qui font la complexité du système du permis de conduire en France aujourd'hui.


Le cœur du problème ne réside pas sur le principe dans l’échec de l’examen à la première présentation. En effet, un certain pourcentage d’échec au premier passage d’un examen reste indispensable, tout d’abord pour crédibiliser toute formation, mais aussi et surtout dans le cas du permis de conduire, pour responsabiliser certains candidats qui minimiseraient les enjeux pour leur future vie de conducteur. Car il faut rester conscient qu’un examen ne se donne pas mais se mérite, c’est un fait. Le principe même de devoir, le cas échéant, repasser l’examen du permis B ne devrait donc pas constituer un véritable souci…sauf que le système complexe mis en place depuis ces dernières années a rendu l’accès à l’examen extrêmement difficile, à tel point que toute obligation de le repasser sonne, pour beaucoup de candidats, comme une sanction qui confine parfois à l’insupportable.

Quand l’administration devient un frein à l’accès au permis de conduire

Si, avant 1972, l’épreuve du Code de la route n’était pas encore instauré et consistait simplement à répondre à quelques questions dans le véhicule en face à face le jour de l’examen du permis, l’évolution de la signalisation et le nombre d’accidents ont démontré qu’il était nécessaire que le conducteur ait une connaissance irréprochable des règles de conduite. Ainsi fut mise en place l’épreuve sur diapositives telle que nous la connaissons aujourd’hui, premier « obstacle » avant de pouvoir obtenir le permis de conduire.

La banque de questions a évolué et s’est étoffée au fil du temps, si bien que certains candidats ont commencé à remettre en cause la légitimité de certaines questions jugées au choix trop pointues, peu claires, sujettes à interprétations diverses… La délégation de la sécurité routière a dû reconnaître elle-même que certaines questions n’étaient pas ou peu adaptées puisqu’elle s’est finalement résolue à modifier 99 de ces questions et à en supprimer 57 autres dans le cadre de la réforme du 19 avril 2010.

Le taux de réussite avait d’ailleurs stagné à plus ou moins 1 % depuis quelques années. D’après le bilan des examens du permis de conduire 2011 de la Délégation à la Sécurité et à la Circulation routières, le taux de réussite national a même légèrement baissé de 2009 à 2010 puisqu’il est passé de 64,9 % en 2009 à 63,2 % en 2010. En 2011 en revanche, le taux de réussite a augmenté d’un peu plus de trois points pour passer à 66,5 %, et encore de deux points en 2012 avec 68,6 %. Les efforts voulus par la réforme auraient peut-être payé avec un peu de retard. À voir si le résultat de l’année 2011 se maintient ou restera exceptionnel. Si l’on examine par exemple le taux de réussite de Paris qui atteint 71,8 % en 2011, on se rend compte que ce chiffre n’est pas exceptionnel et avait déjà été presque atteint à un chouia près en 2009 quand la réforme de la banque de question n’avait pas été entamée… Toujours est-il que des difficultés persistent… Et que repasser l’examen du Code peut également prendre plusieurs mois selon les départements, et coûter un prix parfois aberrant simplement pour une réinscription.

Concernant l’examen pratique du permis, l’épreuve a pris un nouveau tournant avec l’arrêté du 19 mai 2003 relatif à la réforme de l'épreuve pratique de l'examen du permis de conduire de la catégorie B, sur lequel est stipulé que la durée de l’examen pratique passera progressivement de vingt à trente-cinq minutes sur tout le territoire national. Le processus, dont la mise en place s’est achevée pendant l’année 2006, chamboule le déroulement de l’examen pratique pour les candidats, mais pas seulement, puisqu’il perturbe également toute une organisation vis-à-vis des inspecteurs du permis de conduire qui font passer l’examen. Car, dès lors que le temps de l’épreuve augmente, le nombre de candidats pouvant se présenter dans une journée pour un seul inspecteur…diminue. Pour compenser cette augmentation de 75 % de la durée de l’examen, le ministère de l’intérieur assure avoir recruté 425 inspecteurs du permis entre 2002 et 2006. C’était sans compter sur le concours du ministère des transports, de l’équipement, du tourisme et de la mer qui publie en 2006 une nouvelle méthode conçue à l’origine pour garantir un enseignement de qualité dans les auto-écoles : la méthode d’attribution des places dictée par la circulaire n°2006-031. Jusque-là, les places d’examen étaient attribuées selon le nombre d’inscrits, ce qui incitait d’ailleurs les auto écoles à inscrire le plus grand nombre possible de candidats dans leur établissement. Depuis 2006, la situation a complètement changé puisque à présent, le nombre de places est attribué pour l’examen théorique du Code selon le nombre de reçus, et pour l’examen pratique selon le nombre de présentés au permis pour la première fois.

Autrement dit, lorsqu’un candidat échoue aux examens, il fait perdre une place d’examen à l’auto-école et baisser son taux de réussite : le candidat malheureux devient une charge pour l’établissement. Seulement, avec un taux de réussite moyen de 59,1 % à l’examen pratique en première présentation en 2012, la tâche est rude pour présenter chaque mois une majorité constante de premières présentations, sous peine de faire passer les autres élèves ayant échoué au moins une fois à la trappe… Surtout si l’on prend en considération l’augmentation des candidats qui doivent repasser l’examen à cause des retraits de permis (ceux-ci sont estimés à 15 % des candidats qui retentent leur chance à l’examen, et qui viennent gonfler la file d’attente).

Annonce différée : annonce tardive

Par ailleurs, l’annonce différée du résultat de l’examen pratique du permis de conduire entamée en 2001 et appliquée à tout le territoire depuis 2011, rallonge l’attente pour les candidats qui n’obtiennent plus le résultat oral le jour même, mais doivent attendre la réception du résultat par courrier.

En conséquence, les auto-écoles, mais surtout les candidats se retrouvent otages d’un système qui ne leur attribue pas un nombre suffisant de places par rapport à la demande chaque mois, et le délai moyen d’attente pour repasser le permis côtoie les cinq mois sur le plan national, pour atteindre jusqu’à un an dans les grands centres urbains.

Du côté des inspecteurs du permis de conduire, la pénurie demeure plus que jamais d’actualité. En 2008, ils sont à peine 1 250 pour toute la France. Selon un quotidien du Grand Sud, il en fallait déjà 200 à 250 de plus pour éclaircir l’horizon. Pourtant, si l’on examine les chiffres publiés sur le site de la Sécurité routière, seulement 55 inspecteurs ont été recrutés depuis (35 en 2009 et 20 en 2010). À l’heure actuelle, ils ne seraient que 1 292, dont seulement 222 pour la région Île-de-France. Si l’on compte en prime les inspecteurs non remplacés qui ne sont pas sur le terrain proprement dit entre les arrêts maladie et maternité, ou les grèves… Certes, le gouvernement a déjà effectué plusieurs tentatives pour endiguer le problème. En 2007, l’ancienne majorité avait songé à privatiser les inspecteurs du permis, et avait entrepris de recourir à des inspecteurs privés en 2008. Seulement, il s’est heurté à une grève des inspecteurs d’une journée…une journée qui a suffit à l’en décourager : les inspecteurs craignent viscéralement la privatisation de leur secteur et sont fortement mobilisés.

Malgré les efforts de réforme du permis de conduire entamés en 2010, avec, entre autres, la mise en place d’examens supplémentaires le samedi, de gros problème subsistent, notamment dans les grands centres urbains. À titre d’exemple, seulement quatorze inspecteurs sur vingt-deux étaient recensés dans le département des Hauts-de-Seine
pendant le 1er semestre de l’année 2012.

En cette période critique et étant donné la forte demande des inspecteurs du permis de conduire pour faire passer l’examen pratique, on est légitimement en droit de se poser certaines questions, telles que se demander pourquoi l’administration s’obstine à inclure dans les attributions de l’inspecteur du permis l’accueil et la surveillance de l’examen théorique du Code de la route. Après tout, quelles peuvent bien être les compétences techniques requises pour accueillir des élèves en vérifiant leur nombre et leur appartenance, réciter le déroulement de l’épreuve et récolter à la fin de la séance les télécommandes pour débiter automatiquement les tickets comprenant les résultats de l’épreuve ?

Les auto-écoles écartelées entre une administration défaillante et des candidats exaspérés

Certes, certains établissements de conduite peu scrupuleux existent, avec des moniteurs qui bâclent délibérément leurs cours de conduite, où la direction gonfle les tarifs des représentations à l’examen… Mais ce sont justement les auto-écoles honnêtes et les moniteurs qui le sont tout autant, qui pâtissent de cette injuste réputation. Car bien souvent, lorsqu’une auto-école ne peut vous présenter à l’examen aussi vite que vous le souhaiteriez, c’est qu’elle n’a elle-même que peu de places à attribuer pour le mois. Et comme nous l’avons vu, ce ne sont pas les auto-écoles qui décident de leur nombre de places à l’examen pour le mois, mais la préfecture.

Quotidiennement, les secrétaires d’auto-écoles servent de tampon entre l’immobilisme de l’administration dont l’attribution des places est déléguée aux préfectures, et les élèves qui piaffent d’impatience devant le bureau. L’ambiance devient bien souvent électrique lorsque les délais d’attente déjà pas très glorieux s’allongent à la moindre grève des inspecteurs du permis de conduire. Or, rien qu’une seule journée de grève des inspecteurs peut coûter très cher aux candidats, et provoquer le report de 1 000 à 2 000 examens du permis de conduire.

Une histoire d'argent aussi

Quant aux coûts de la formation en école de conduite, ceux-ci sont bel et bien, il est vrai, fixés librement par chaque auto-école. De manière logique, les tarifs se retrouvent plus élevés dans les centres urbains où le coût de la vie est aussi plus cher. En théorie, les auto-écoles ne dégagent pas une marge bien importante. Beaucoup invoquent des raisons légitimes pour faire payer « si cher » la formation. Une heure de conduite n’occasionnerait pas forcément une véritable marge pour l’auto-école.
Entre le coût de l'essence, les locations de voiture, l’assurance, les salaires des moniteurs, les charges sur salaire, les frais de réparation, la TVA, les charges fixes (loyer, eau, chauffage, électricité, impôts divers), la marge dégagée par l’auto-école représenterait, d’après une auto-école de Reims, entre 14 % à 28 % environ après avoir payé les charges ci-dessus. De plus, l’établissement de conduite est également tenu de calquer ses tarifs en fonction de l’inflation : hausse du prix de l’essence, de l’immobiliser (loyers), des coûts salariaux… Conséquence, l’auto-école doit bien trouver un moyen d’avoir une affaire rentable, et compense généralement ses charges avec ses tarifs appliqués à la formation au Code, aux frais de dossier, et aux frais de présentation aux examens (gratuit en Préfecture). Ensuite, comme pour n’importe quel commerce, certains établissement abusent sur les tarifs, au détriment du candidat.

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, la formation au permis de conduire français, comparativement aux autres pays de l’Union européenne, se situerait dans la moyenne.

Des pays comme la Belgique ou la Grande-Bretagne posséderaient une fourchette de tarifs de formation plus ou moins similaire à la France, soit entre 1 000 et 1 200 €. La palme reviendrait du plus cher au moins cher au Danemark (environ 1 900 €), aux Pays-Bas (environ 1 800 €), à l’Autriche, et à l’Allemagne, avec une moyenne de 1 600 € pour obtenir son permis1. Seuls des pays tels que l’Espagne (entre 500 et 1000 €), le Portugal, l’Italie (850 €) ou, mieux encore, la Pologne (300 €) s’avéreraient réellement en dessous de la moyenne française. Certes, il ne s’agit là que d’indications d’obtention du permis pour une formation de base, car les délais d’attente et les rallonges d’argent parfois astronomiques spécifiquement français ne sont pas pris en compte dans l’estimation moyenne nationale du coût du permis.

Un monde où inspecteurs et auto-écoles se renvoient la balle

D’un côté, les auto-écoles reprochent aux inspecteurs de ne rien faire pour faire changer les choses, et de l’autre, les inspecteurs soutiennent que les auto-écoles cultivent la spirale de l’échec en profitant des frais de représentation à l’examen payés par les candidats lorsqu’ils doivent retenter l’examen. Inévitablement, chacun prêche pour sa paroisse.

Quant à la question des quotas, il est vrai que la rumeur est entretenue depuis des années sur les parcours d’examen. Parmi les candidats, chacun y va de sa petite histoire, ou de son ouï-dire. De leur côté, les inspecteurs démentent énergiquement. Officieusement, la rumeur circule, mais officiellement, rien ne prouve réellement la chose. Curieusement, il serait presque question de quotas en faveur des élèves. Christian Grolier, secrétaire général du syndicat SNICA FO (Syndicat national Force Ouvrière des inspecteurs, cadres et administratifs du permis de conduire et de la sécurité routière), admettait il y a quelques années que les inspecteurs subissaient « des pressions de la hiérarchie, ces derniers temps, pour donner plus de permis et désengorger les files d’attente ». Plus récemment, lors de la grève illimitée des inspecteurs au mois d’octobre 2011, il a contesté l’objectif du gouvernement d’atteindre les 66% de réussite du premier coup au permis, invoquant l’absence de réformes permettant de réaliser un tel taux de réussite, et déplore : « En plus des aides financières comme la bourse au permis ou le permis à 1 euro, l’Éducation nationale pourrait faire de la formation ». Or, est-ce le rôle de l’Éducation nationale de former les candidats ? N'existe-t-il pas un moyen de former les candidats avec des bases et une sensibilisation plus solides dans les auto-écoles en commençant par des cours de code dignes de ce nom, plutôt que de simple diapositives passées à la chaîne ?

Conséquences des freins à l’accès au permis : les auto-écoles trinquent, et les candidats boivent la tasse

1. Conséquence des temps d’attente qui s’allongent pour passer l’examen, certains établissements de conduite saturés ne peuvent plus proposer de leçons de conduite avec un véritable suivi, le planning de leurs moniteurs étant surchargé. Les candidats peuvent ainsi être pénalisés avec des cours trop espacés et un entraînement moins efficace.

2. Ne s’en sortant plus, certains établissements de conduite se donnent parfois le droit de ne plus reprendre leurs élèves qui auraient échoué trois fois à l’examen. Du reste, plusieurs auto-écoles, étouffant sous la pression de certains élèves, en arrivent même à faire signer aux plus pressés un accord selon lequel le candidat s’engage à réussir son examen du permis du premier coup sous peine de devoir changer d’établissement de conduite (et donc de payer à nouveau des frais de transfert, et des frais d’inscription à une nouvelle auto école, à supposé qu’ils arrivent à en trouver une qui veuille bien d’eux, ce qui est bien improbable pour les raisons citées dans ce chapitre…).

3. L’Unic (Union Nationale des Indépendants de la Conduite) estime à quatre millions le nombre de dossiers d’examens en attente, et réclame d’ailleurs que la mission d’évaluation du stock de dossiers lancée par l’administration il y a deux ans publie ses chiffres de façon officielle.

4. Autre conséquence des difficultés d’accès à l’examen : le nombre de conducteurs circulant sans permis de conduire en France, et donc, sans assurance. Si aucune statistique précise n’existe concernant le nombre exact de conducteurs sans permis, la seule référence officielle provient de l’observatoire interministériel de la sécurité routière, qui estime dans son bilan 2010 de la sécurité routière qu’ils sont « un peu plus de 450 000 ». Toujours selon ce même bilan, parmi les conducteurs sans permis impliqués dans un accident corporel, 74 % n’ont jamais obtenu de permis de conduire.
D’autres sources non officielles telles que l’auteur Airy Routier dans son livre La France Sans Permis publié en 2007, évalue quant à lui le nombre de conducteurs sans permis à 2,5 millions… Enfin, selon Alain Fouché, sénateur UMP à l’origine d’un assouplissement du permis à points, 700 000 conducteurs rouleraient sans permis.

Mois qui défilent et dont les candidats ne voient plus le bout, économies sans fin à dépenser sous peine de devoir tout abandonner, auto-écoles qui ne veulent plus (et/ou ne peuvent plus) assurer une formation suivie, et garder ou prendre des candidats… Les candidats au permis de conduire n’ont plus vraiment, et c’est là tout le problème, le droit à l’erreur.

L’examen du permis de conduire est-il réellement efficace ?

Finalement, on peut aussi être amené à se demander si la formation et les examens remplissent pleinement leur fonction à savoir : enseigner la conduite et surtout, responsabiliser le candidat de façon à ce que celui-ci continue d’être prudent et n’oublie pas les règles qu’il s’est efforcé à appliquer le jour de l’examen.

L’examen en soi n’est pas forcément très représentatif dans le sens où certains candidats peuvent prendre l’examen à la façon d’un bachotage pur et simple et séduire l’inspecteur à l’instant T. L’exemple le plus flagrant de ce type de comportement redouté se constate malheureusement dans des cas rapportés où des jeunes qui viennent d’obtenir leur permis de conduire sans problèmes se tuent sur la route quelques jours après une sortie bien arrosée. Ironie du sort, certains de ces jeunes voulaient « fêter »… l’obtention de leur permis de conduire. Parfois mis au courant, les inspecteurs du permis concernés qui ont évalué les victimes quelques jours auparavant ne peuvent qu’être choqués, car aucun signe ne leur permettait de déceler le potentiel à risque desdits candidats, et encore moins en trente-cinq minutes.

Des enjeux mal définis

C’est pourquoi, il apparaît capital de bien sensibiliser les candidats aux risques et enjeux de devenir conducteur. En cette période où les jeux vidéo et l’image en particulier véhiculée par Internet règnent en maître et où beaucoup de jeunes ont tendance à confondre réalité et virtualité, les moyens à employer doivent à l’évidence impliquer concrètement les jeunes, et marquer leur esprit.

Qui dit meilleure sensibilisation dit aussi meilleure sélection et formation des moniteurs. Car il apparaît évident que certains passent à travers les mailles du filet et choisissent le métier de moniteur d'auto-école...à défaut d'autre chose, et réussissent à devenir moniteur en discréditant tous ceux qui exercent leur métier de façon honnête et pédagogue. A ce titre, le métier de moniteur devrait sans doute être valorisé par une meilleure formation, et certainement, par un meilleur salaire : être moniteur ne doit pas être assimilé à un petit boulot à défaut d'avoir trouvé un job, mais à une passion, une vocation, comme n'importe quel métier d'enseignement. Une tentative de ce genre a pourtant été avortée en 2007 lors du premier conseil de modernisation des politiques publiques (CMPP). Celui-ci prévoyait une réforme qui incluait entre autres une amélioration de la formation des moniteurs d’auto-école.

Il serait intéressant de pouvoir détecter, lors de sa formation, si un moniteur ne présente pas de comportements à risques comme un manque de sang-froid évident, une tendance facile à la domination, voire de la misogynie… On pourra penser que c’est de l’exagération, mais lorsque par malheur, un futur moniteur obtient son autorisation d’enseigner cependant qu’il n’est pas à sa place, c’est-à-dire pas moniteur de conduite pour les bonnes raisons, cela peut vite virer au cauchemar pour les élèves. Sans compter que ce genre de personnalité se bonifie rarement avec le temps…

Dans le même ordre d’idées, pourquoi également ne pas donner enfin une alternative en matière de formation pour les élèves et en matière de conditions de travail pour les moniteurs (qui souvent ne gagnent pas plus que le SMIC en auto-école), et, accessoirement aussi pour désengorger certaines auto-écoles, en autorisant les moniteurs indépendants à enseigner à des candidats qui le souhaiteraient, à titre onéreux ? Les apprentis conducteurs inscrits en candidat libre pourraient y trouver leur compte, tout comme les inscrits en auto-école qui pâtissent parfois de plannings saturés des moniteurs en auto-école ou qui n’ont parfois qu’un seul moniteur dans l’agence et pourraient consolider leur formation sans perdre trop de temps.

Par ailleurs, si l’on examine les chiffres de 2011 et 2012 de l’examen du permis B1, on constate que plus de femmes que d’hommes se sont présentées à l’examen (environ 52,9 % en 2011, et 53,1 % en 2012), mais que le taux de réussite à l’examen pour les hommes est meilleur avec 10,9 % de plus que pour les femmes, aussi bien en 2011 qu’en 2012). Doit-on y voir là le signe que les femmes seraient naturellement plus impressionnables et plus facilement sujettes au stress que les hommes le jour de l’examen ? Il n’empêche, si l’on se réfère à certaines statistiques comme celles évoquées par le pôle Sécurité routière de la préfecture de police de Paris le 7 mars 2012 lors d’une table ronde consacrée aux différences de comportements entre les femmes et les hommes au volant, le résultat est totalement inversé. Ainsi, les chiffres rapportent qu’en 2011, les accidents mortels au sein de la capitale ont été commis par des hommes à 94,4 % et les accidents de blessés graves à 87,5 % toujours par des hommes. Toujours au cours de cette même table ronde, une femme monitrice intervenante a avancé que si ses élèves masculins percevaient souvent la voiture « comme un jouet » les femmes, elles, y voyaient un côté pratique et seraient « plus réceptives à l'apprentissage » se souvenant pendant plus longtemps des conseils de leur moniteur.

La réussite des alternatives à la formation traditionnelle

À l’heure actuelle, les résultats les plus probants sont obtenus par la filière de l’Apprentissage Anticipé de la Conduite (AAC), avec un taux de réussite national d’environ 73,5 % en 2012, et un risque d’accidents moindre, bien reconnu par les assurances. Problème, les candidats sont de moins en moins nombreux chaque année à se présenter à l’examen en ayant suivi cette filière. Alors que le taux de réussite de l’AAC augmente tous les ans, le nombre de permis délivrés, lui, baisse sensiblement ces dernières années : 202 981 permis délivrés en 2009, 200 576 permis délivrés en 2010… et une chute vertigineuse avec seulement 190 628 permis délivrés en 2011 et 181 006 permis en 2012.

Quant à la formation de la conduite supervisée (conçue sur le même principe que la filière AAC mais plus courte) apparue seulement en 2010, les résultats sont inférieurs à l’AAC mais tout de même supérieurs à la formation traditionnelle (environ 58,4 % vs 54,9 %). Mais peu de jeunes semblent connaître l’existence de cette formation pour le moment.

Pour ce qui est de la filière en candidat libre, celle-ci n’est guère répandue compte tenu du fait que l’attribution des dates d’examens donne la priorité aux candidats d’auto écoles…

S’il est vrai qu’aucun système n’est parfait, celui qui régit le permis de conduire mérite sans détour une rénovation en profondeur, et ce, avant tout pour arrêter de pénaliser les candidats qui échouent à l’examen. Car l’échec doit au contraire être une chance de prendre conscience de ses limites pour se responsabiliser et rebondir, et non pas un motif pour vivre un calvaire économique et financier qui fait perdre tout son sens à un examen tel que celui-ci dont l’utilité peut être primordiale, voire vitale .

Système d’attribution des dates, nombre d’inspecteurs et attributions de ces derniers, révision du statut du moniteur indépendant…autant de questions qui, si elles trouvent leurs réponses, épargneront aux candidats des mois de galère, et de gros sacrifices financiers. En amont, s’impose également une longue réflexion sur les moyens à mettre en œuvre pour un plus grand éveil des consciences des candidats et une formation plus adaptée, où les abus aussi bien financiers que comportementaux seraient traqués et éradiqués.


Nina Belile est l'auteure de ce sujet, ainsi que du livre Permis de galérer.

Le passage du permis B (auto), elle le connaît mieux que quiconque pour l'avoir obtenu en 2011 à l'âge de 30 ans, après un très long chemin semé d’embûches en tous genres.

Dix moniteurs différents, pas moins 118 heures de conduite, 6 000 € et la réussite en tant que candidat libre, au total son permis de conduire lui est revenu en termes de temps au passage d'un BTS (2 ans).

Si elle dénonce les failles du système d'apprentissage de la conduite en France dans son ouvrage, Nina Belile a également la volonté de faire partager sa longue expérience et ses conseils aux autres candidats dans les colonnes de Permis Pratique comme journaliste.


Retrouvez aussi Nina Belile sur le site web dédié à son livre : Permis de galérer

Dimanche 6 Avril 2014
Nina Belile


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